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Prévenir la dénutrition : l’apport du pharmacien

En Belgique, près d’un tiers des résidents en maison de repos présentent une dénutrition. Même à domicile, environ 3 % des plus de 65 ans en souffrent, selon une enquête de Sciensano. Or la dénutrition, souvent silencieuse, impacte directement la tolérance aux traitements, le risque de complications et la qualité de vie.

Dénutrition personne âgée pharmacien
© Getty Images

À l’occasion de la Malnutrition Awareness Week, organisée en novembre dans une vingtaine de pays européens, la coalition BeONCA (Optimal Nutritional Care for all) a souhaité rappeler que tous les prestataires de première ligne ont un rôle stratégique dans le dépistage et la prévention de la dénutrition liée à l’âge ou à la maladie. 

La dénutrition liée à l’âge et/ou à la maladie reste sous-estimée. Pourtant, son dépistage et sa prévention constituent un enjeu majeur de santé publique. Les pharmaciens ont un rôle décisif à jouer, en première ligne, pour repérer les signes précoces, accompagner l’utilisation des compléments nutritionnels oraux (CNO) et sensibiliser patients comme aidants. Comme le rappellent le Dr André Van Gossum et al., membres de la BeONCA, « le statut nutritionnel a un impact sur la tolérance aux traitements, le risque de complications, la mortalité, la qualité de vie mais aussi sur les coûts de soins de santé »[1].

Comprendre la dénutrition

Les auteurs définissent d’abord la dénutrition, qui « correspond à un déséquilibre entre les apports nutritionnels et les besoins énergétiques causant une altération des fonctions de l’organisme et une diminution des capacités physiques et mentales, ce qui impacte le pronostic global du sujet et sa qualité de vie »

Chez le patient jeune, la dénutrition est surtout liée à une maladie, tandis que chez le sujet âgé, elle est souvent multifactorielle : perte d’appétit, troubles dentaires ou de déglutition, maladies chroniques, polymédication, isolement, deuil, passage en institution... Sans oublier les facteurs socio-économiques. « Une alimentation de moindre qualité nutritionnelle est en général moins chère », soulignent les auteurs, ce qui peut accentuer la vulnérabilité de certaines personnes âgées.

Le dépistage régulier est essentiel. Le Mini Nutritional Assessment (MNA) reste l’outil le plus utilisé pour les plus de 65 ans. En version courte (MNA-Short Form), il ne prend que quelques minutes. Les critères GLIM, plus récents, combinent facteurs phénotypiques (perte de poids, BMI bas, diminution de la masse musculaire) et étiologiques (apports insuffisants, inflammation). Le pharmacien n’établit pas seul le diagnostic, mais il peut identifier les signaux d’alerte et orienter vers le médecin ou le diététicien.

Le rôle du pharmacien en première ligne

Au comptoir, le pharmacien est souvent le premier témoin de changements subtils : un patient qui a perdu du poids, se plaint de fatigue ou a modifié son alimentation à cause d’effets secondaires médicamenteux.

Son rôle est triple. D’abord surveiller les traitements. Le pharmacien peut repérer les molécules susceptibles de diminuer l’appétit, altérer le goût ou provoquer des troubles digestifs, et en discuter avec le prescripteur.

Ensuite, donner des conseils nutritionnels simples : rappeler les besoins accrus en protéines (1 à 1,2 g/kg/jour), l’importance d’une hydratation correcte malgré la baisse de sensation de soif, ou encore encourager le maintien d’une activité physique adaptée.

Enfin, le pharmacien peut accompagner le patient dans la prise de CNO. Il faut cependant rester prudent, et expliquer leur place en supplément d’une alimentation adaptée, vérifier l’adhésion et signaler au médecin en cas de mauvaise tolérance. « Les CNO ne doivent pas être prescrits systématiquement en première intention mais seulement en cas d’échec d’une alimentation adaptée ou enrichie », précisent les experts.

Prévenir plutôt que corriger

La prévention est essentielle : une dénutrition installée est plus difficile à corriger. Le pharmacien, en contact régulier avec les patients âgés, peut proposer un dépistage annuel, notamment lors d’un bilan médicamenteux ou d’une réconciliation après hospitalisation. Sa position privilégiée dans le suivi des polymédiqués lui permet aussi d’intégrer le statut nutritionnel dans la prise en charge globale.

En maison de repos, le manque de formation nutritionnelle du personnel et des budgets alimentaires restreints fragilisent encore l’offre. Les pharmaciens, en lien avec les médecins et les diététiciens, peuvent contribuer à une approche coordonnée. « L’intervention nutritionnelle doit être intégrée dans la prise en charge thérapeutique globale en concertation avec tous les intervenants », insiste la BeONCA.

[1] Cet article est basé sur un texte remis au journal du Médecin, « Prévention et prise en charge de la dénutrition de la personne âgée », écrit par Van Gossum A., Delwaide M., Farine S., Dries S., Geurden B., au nom des membres de BeONCA (belgianalliance.onca@gmail.com).

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Écrit par Laurent Zanella8 septembre 2025

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