En France, le nouveau plafonnement des remises sur les médicaments met les officines sous pression
Un arrêté publié lundi au Journal officiel (équivalent français de notre Moniteur belge) rebat les cartes des relations commerciales entre pharmaciens d’officine et laboratoires pharmaceutiques. Pris conjointement par les ministères de la Santé et de l’Économie, ce texte fixe progressivement de nouveaux plafonds aux remises, ristournes et avantages commerciaux accordés par les laboratoires sur plusieurs types de médicaments. Objectif affiché : encadrer plus strictement ces pratiques et assurer une meilleure équité entre acteurs.

À compter du 1er janvier 2028, ces avantages commerciaux seront plafonnés à 20 % du prix fabricant hors taxes, par an et par ligne de produits, pour chaque officine. La mesure concerne les spécialités génériques, les médicaments hybrides substituables, les biosimilaires et leurs équivalents de référence.
Moins de marge de manœuvre
Un dispositif transitoire est prévu, avec des seuils dégressifs sur trois tranches annuelles successives (2025-2028), allant de 30 % au départ à 20 % à terme. Un rapport d’impact est attendu pour mai 2026, pour évaluer notamment l’effet de ces plafonds sur les taux réels de remise et la pénétration des spécialités concernées.
Pour les pharmaciens, la baisse des marges commerciales attendue risque de fragiliser certains modèles économiques, en particulier ceux qui dépendaient des remises pour compenser d'autres baisses de revenus. Moins de latitude pour négocier avec les laboratoires signifie aussi moins de différenciation possible entre officines. D’autant que la tendance s’ajoute à d’autres contraintes : inflation des coûts, baisse des volumes, obligations accrues en matière de services de santé publique.
Big Pharma's : frein ou opportunité ?
Du côté des grands laboratoires pharmaceutiques, cette régulation pourrait apparaître comme une perte de levier commercial. Pourtant, à moyen terme, on peut leur y trouver une opportunité de consolidation. "Baisser le plafond des remises génériques est une ineptie qui ne fera pas économiser un centime aux citoyens, mais enrichira quelques gros laboratoires", critique Laurent Filoche, pharmacien et président de l'UDGPO (Union des groupements de pharmaciens d'officine).
Moins dépendants des stratégies de remise que les petits laboratoires, les groupes comme Sanofi ou Pfizer pourraient tirer leur épingle du jeu grâce à leur force de frappe marketing, leur réseau et leur portefeuille de produits innovants. Ce nouvel encadrement pourrait donc, paradoxalement, renforcer leur position face à des concurrents plus fragiles, tout en contribuant à une meilleure maîtrise des dépenses de santé.
Appel à faire plier le gouvernement
Sur les réseaux et dans le magazine français d'information pour pharmaciens Pharma365, Laurent Filoche note une mobilisation massive : "Ce n’est pas une grogne isolée. C’est une alerte générale. Le gouvernement devrait comprendre qu’on ne s’oppose pas à 20 000 pharmaciens sans conséquences. La profession parle d'une seule voix, c'est inédit !"
Il appelle à faire pression sur le gouvernement, dans une comparaison avec la mobilisation des médecins contre le plan Juppé en 19951 : "Notre objectif est clair : faire plier le gouvernement. Nous ne voulons pas d’un moindre mal, nous voulons un changement de cap. Nous ne laisserons pas détruire la pharmacie."
1 La mobilisation des médecins face au plan Juppé de 1995
Le Plan Juppé de 1995, présenté par le Premier ministre Alain Juppé dans le cadre d'une vaste réforme de la Sécurité sociale, visait à maîtriser les dépenses de santé et à réorganiser en profondeur le système hospitalier français. Il prévoyait la création d’Objectifs nationaux de dépenses d’assurance maladie (ONDAM), la mise en place de nouvelles agences régionales de l’hospitalisation (ARH), et un renforcement du contrôle budgétaire des hôpitaux. Ce plan ambitionnait également de renforcer le rôle de l’État dans la régulation du système de santé, au détriment de l’autonomie des professions médicales et des partenaires sociaux, jusque-là très impliqués dans la gestion des caisses de Sécurité sociale.
Face à ces mesures jugées technocratiques et centralisatrices, les médecins libéraux, en particulier les généralistes, se sont vivement opposés au plan. Inquiets de la remise en cause de leur liberté de prescription et de la perspective d’un encadrement accru de leurs honoraires, ils ont organisé une mobilisation inédite : manifestations, grèves de la télétransmission des feuilles de soins, voire fermeture temporaire de cabinets. Cette contestation, couplée à d’autres mouvements sociaux massifs (notamment dans les transports), a affaibli politiquement le gouvernement. Si le plan a été maintenu dans ses grandes lignes, la mobilisation des médecins a permis de freiner certaines dispositions, notamment celles perçues comme trop contraignantes pour la profession libérale, et a marqué un tournant dans les relations entre l’État et les professionnels de santé.
(le texte de cet encadré a été généré à l'aide de l'IA)