Étude belge publiée dans The Lancet
Il serait possible de réduire d'un quart les prescriptions d'antibiotiques chez les enfants
Une nouvelle approche destinée aux médecins généralistes pourrait réduire d'un quart le nombre de prescriptions d'antibiotiques aux enfants malades, sans conséquences négatives. C'est ce qui ressort d'une étude menée par six universités belges sous la direction de la KU Leuven.
La résistance aux antibiotiques est l'une des plus grandes menaces pour la santé publique dans le monde. La prescription inutile d'antibiotiques, pour des infections respiratoires ou des otites par exemple, en est une cause majeure. En Belgique, un enfant malade sur cinq qui se rend chez le médecin généraliste reçoit un antibiotique, même si cela n'est souvent pas nécessaire.
"Chez les enfants, nous constatons que l'on prescrit relativement plus d'antibiotiques que dans la population générale", explique Ruben Burvenich (KU Leuven, University of Tasmania), co-auteur de l'étude. Cela découle souvent d'une "incertitude diagnostique" : il n'est souvent pas facile pour les enfants d'expliquer clairement où et quel type de douleur ils ressentent, ce qui rend également difficile pour les médecins de poser un diagnostic correct. Ils prennent alors un 'pari sûr' et prescrivent des antibiotiques, souvent inutilement".
Trois signes cliniques
Des chercheurs de six universités belges ont donc mis au point un plan par étapes à l'intention des médecins généralistes et des pédiatres afin de réduire les prescriptions inutiles. Dans un premier temps, le médecin examine trois signes cliniques qui peuvent indiquer un risque accru d'infection : une fièvre d'au moins 40 °C, un essoufflement ou le sentiment du médecin que "quelque chose ne va pas".
#Si l'un de ces trois signes est présent, le médecin passe à la deuxième étape : le test de CRP par piqûre au doigt. À partir d'une goutte de sang, l'appareil mesure la présence du paramètre inflammatoire CRP. Une valeur faible permet d'exclure une infection grave et d'éviter la prise d'antibiotiques inutiles. La troisième étape est le "filet de sécurité" : les parents reçoivent des informations claires sur les symptômes à surveiller et sur le moment où ils doivent recontacter le médecin.
Aide à la décision
L'efficacité du plan par étapes a été testée à grande échelle. Au total, 6 750 enfants âgés de 6 mois à 12 ans ont participé à l'étude, répartis dans 171 cabinets médicaux en Belgique, soit plus de 400 médecins. Les cabinets ont été divisés au hasard en deux groupes : un groupe a travaillé avec l'aide à la décision, tandis que le groupe de contrôle a dispensé les soins habituels.
Les résultats ont été clairs : dans le groupe utilisant l'aide à la décision, le nombre de prescriptions d'antibiotiques a chuté de manière significative à 16 %, contre 22 % dans le groupe de contrôle. Il y a donc eu un quart de prescriptions en moins. Parallèlement, la durée de la maladie est restée la même dans les deux groupes, et les enfants du groupe ayant bénéficié d'une aide à la décision n'ont pas eu à subir davantage d'examens complémentaires, d'hospitalisations ou de consultations de suivi, par rapport au groupe témoin. Lors du suivi à 30 jours, le groupe d'intervention ne semble pas non plus s'être vu prescrire plus d'antibiotiques que le groupe témoin.
Feuille de route
Les chercheurs ont également examiné le coût global de la feuille de route. Celui-ci semble être équilibré par rapport aux avantages. À long terme, les effets sur la résistance aux antibiotiques pourraient être importants. Toutefois, le remboursement du test rapide de la CRP et un cadre juridique pour l'utilisation en dehors des hôpitaux doivent encore être clarifiés.
"La prescription d'antibiotiques doit se faire de la bonne manière, au bon moment et pour le bon patient", déclare le professeur Jan Verbakel (KU Leuven), auteur principal de l'étude. "Avec cette feuille de route, nous montrons aux médecins la voie à suivre pour réduire les prescriptions inutiles à court terme et la résistance aux antibiotiques à long terme.
Les résultats de l'étude ont été publiés dans la célèbre revue scientifique The Lancet. Les universités participantes étaient la KU Leuven, l'UAntwerpen, la VUB, l'UGent, l'ULiège et l'UCLouvain.